Sous l'orage. [RP libre]

Le calme avant la tempête. C'était l'impression que lui donnait l'atmosphère lorsqu'Azara sortit de la forêt pour se rendre à la toundra. Elle avait besoin d'un peu de solitude, de paix du moins, après avoir passé la journée à apprendre aux jeunes loups la chasse, comme elle l'avait promis à Imala. La guérisseuse commençait à manquer de temps pour accomplir toutes ses tâches, c'était bien normal, et Azara ne pouvait se permettre de laisser tomber les membres de sa meute qui commençaient à traîner de la patte. Ses connaissances en chasse lui servaient de toute façon, mieux que celles d'Imala. Elle avait l'impression de jouer le même rôle que sa défunte mère, qui lui avait tout appris. Mais après autant d'actions, de la gestion des louveteaux préférant jouer au désarroi de ceux qui n'arrivaient pas à pister quoique ce soit, la petite louve blanche était un peu épuisée.

Lorsqu'elle quitta la couverture des arbres, Azara remarqua que le vent avait cessé, du moins momentanément, mais que le ciel était sombre. Elle entendit le tonnerre qui bourdonnait au loin et elle vit même les éclairs qui commençaient à frapper le sol. Ce n'était pas une très bonne idée de s'aventurer dans ce genre de tempête, mais l'orage était loin encore et Azara était toujours près de la lisière de la forêt, où elle pourrait venir se réfugier en cas de besoin. Observant l'horizon, la bêta remarqua un autre loup au loin. Sa fourrure grise et brune, de même que son corps élancé, lui rappela aussitôt Varzar. L'alpha du centre. Avait-il vraiment osé revenir ici? Azara gronda sourdement et s'élança aussitôt à pleines jambes, sans réfléchir.

Lorsqu'elle écrasa un tas de branches mortes de son poids et qu'elle fut à quelques mètres seulement de l'intrus, ce dernier se tourna vers elle. Le vent repris au même moment et amena à Azara l'odeur familière de sa meute. Elle se figea vivement. Ce qu'elle avait perçu de loin comme un pelage brunâtre n'était que de la boue collée au pellage gris d'une des siens. Azara resta surprise quelques instants. Comment avait-elle pu ne pas la reconnaître? C'était une de leurs chasseuses, Lumka. Un peu penaude, Azara s'excusa :

—Je suis désolée, Lumka. De loin, je t'ai prise pour une autre. Quelqu'un que je n'avais pas envie de voir ici.

Azara ne savait pas si la louve connaissait bien les problèmes qu'avaient engendré l'alliance entre les meutes du Nord et du Sud, ni toute l'histoire concernant leurs ennemis au centre. Elle se contenta donc de respirer un bon coup et d'espérer que Lumka, qu'elle connaissait peu, ne lui en tiendrait pas rigueur.

Même si la louve au pelage gris avait semblé aussi surprise qu'elle, son calme détendit Azara. Il y avait eu méprise, mais pas de mal. Visiblement, Lumka n'était pas la louve la plus bavarde de la meute. Aussitôt, elle détourna le regard et observa le spectacle qui se déchaînait encore au loin. La bêta eut un léger sourire. Lumka lui ressemblait beaucoup, au fond. Même si Azara semblait avoir le nez enfoui partout dernièrement, surtout depuis qu'elle était le bras droit des dirigeants de la meute, elle était au fond très silencieuse aussi. Observatrice. Posée. Il fallait réfléchir avant de parler, ne pas dire des choses inutiles.

Lumka sembla l'inviter à s'installer auprès d'elle. Azara vint s'étendre au sol près de la louve, son ventre dans la terre un peu boueuse. La chaleur corporelle de l'autre, bien qu'elles ne se touchaient pas, réchauffa un peu la petite louve blanche du vent qui battait contre leurs corps. Tu es venue pour éviter quelqu'un? La louve réfléchit. Était-ce le cas? Elle ne fuyait pas les siens, en fait. Elle venait se retrouver, plutôt.

—Disons que parfois, j'ai besoin du calme que seule ma propre compagnie peut m'apporter.

Elle jeta un regard à la jeune louve. Elle aimait bien sa présence, toutefois. Lumka ne prenait pas trop de place. C'était comme si elle l'accompagnait plutôt dans son moment de solitude. Azara se lécha un peu les pattes, apaisée, tout en parlant d'une voix faible.

—Je suis une de celles qui apprend aux jeunes louveteaux la chasse. C'était ce que je faisais avant d'être bêta, expliqua Azara en se rappelant que Lumka n'était pas des leurs lorsqu'elle était toujours chasseuse. Nous avons perdu beaucoup des nôtres l'hiver dernier et je dois malheureusement mettre les bouchées doubles maintenant, faire le travail de ceux que nous avons perdus.

Azara s'arrêta pour dévisager les pattes pleines de boue de sa camarade. Elle revenait probablement d'une longue promenade. Quelques secondes s'écoula, alors que la louve blanche méditait une idée. Deux éclairs frappèrent le sol.

—Peut-être pourrais-tu nous aider, d'ailleurs? Une chasseuse expérimentée comme toi serait peut-être plus écoutée par nos petites tornades.

Elle se rappela les jeunes loups qui courraient dans tous les sens, indomptables. Elle n'était peut-être pas très crédible, à leurs yeux. Peut-être écouteraient-ils davantage Lumka?